En ce jour, si particulier pour moi et ma vie toute entière, après des heures et des nuits de réflexions et d’introspections, je me suis décidé à t’écrire ces quelques mots. Un simple texte si imparfait et pourtant si détaché de mes réactions épidermiques, égotiques ou narcissiques. L’on pourra rallier ma démarche et ne pas la trouver pas à hauteur d’homme, mais j’assume et en revendique chaque mot, chaque virgule, chaque syllabe, chaque silence.
Toi, qui est parti te réfugier à l’endroit même de nos origines, je voulais te dire que je resterai, quoiqu’on attende ou espère de moi, un enfant naïf et, si candide, comme tu me le faisais souvent remarquer.
Je ne veux nullement être de cette race d’homme qui cherche à sauver son honneur, sa face ou sa réputation. À prouver par un quelconque subterfuge, que je suis viril. Illusion ou héritage pour justifier les trahisons et les injustices. Au contraire, j’aimme de plus en plus, avec l’âge qui avance et la raison qui s’éloigne, l’expression pure de ma naïveté. Ce regard lucide et si attendrissant sur ce que j’ai fait ou pas fait. Accepter mes défaillances et mes quelques qualités. Mes limites et mes aspirations. Pardonner les injustices commises ou celles que j’ai subie. Bien qu’il ne fera pas changer le monde et qu’il ne fera rien oublier, ce texte, en souvenir de tes bras, de tes genoux, de ton regard, de ton sourire, de tes colères, du temps passé ensemble à Had Gharbia, est un témoignage modeste de la nécessité impérieuse à croire en l’Ammour. Cet Ammour qui se confond avec Dieu. Cet Ammour qui est Dieu.
Toi, aujourd’hui proche de Lui, tu pourras lui dire, qu’à l’évidence, mes dernières années, furent jalonnées de mes erreurs, mes errances et de toutes ces blessures que j’ai pu infliger et fais subir. Je sais pertinemment que mes difficultés à agir et mes peurs ont été autant d’obstacles, de freins pour vivre en équilibre, aligné et en harmonie avec ce que je suis et ce que je ne suis pas. Une leçon fracassante sur ma vie. Un rappel de ce vertige vécu quand il a fallu, pour remplir la jarre d’eau fraîche, aller chercher de l’eau au puit à Had Gharbia.
Toi, aujourd’hui, proche de Lui, tu pourras lui chuchoter que les orages, les déchirements, les colères, les fulgurances, les connexions, les abandons, les érotismes, les extinctions, les révélations, les fous rires, les larmes, les plaies, les intimités et les jouissances ne sont, en réalité, que les pavés cabossés de mon chemin et de mon cheminement. Un souvenir encore tenace de nos promenades nocturnes en pleine nuit noire entre les cactus, leurs figues, leurs piquants et les mûriers sauvages à Had Gharbia.
Toi, aujourd’hui, proche de Lui, tu pourras le remercier de son offrande céleste, pour les uns, un fardeau pour les autres, cette offrande qui a illuminé toutes mes parts d’ombre et montrer au monde entier que j’étais, que je suis et que je resterai fidèle à ma fragilité et ma naïveté, moi petit gamin jouant dans les champs ensoleillés, sans télévision, sans téléphone ou sans aucun autre artifice, à Had Gharbia
À toi, là où tu es, inspiré par les attributs de Dieu décrits par St Thomas d’Aquin, je te dis par écrit, avant de te rejoindre bientôt parmi ma soeur, ma fille, mes ancêtres et mon maitre, que l’Ammour ne se dévoile que dans le face à face des âmmes. Cet Ammour, comme une sobre ivresse, se forge dans la simplicité. Non pas l’opposé de la complexité mais l’opposé de composé. Cette simplicité me procure infini et éternité. Tout devient alors perfection. Rien à rajouter, rien à enlever. Se dévoile alors notre plénitude. Omniprésent et Unique, traduction humaine de l’unité et de l’unicité., l’Ammour de la Création conduit au Créateur et celui du Créateur aux créatures. Un seul et même chemin, un seul et même cheminement. Voilà ce que voulais te dire, moi grain de sel, voué à se dissoudre dans l’Océan, pas très loin de Had Gharbi